Gare, gare !

Publié le par Huguette DREIKAUS

Une gare est un lieu pas comme les autres. Elle vit 24 heures sur 24. Elle voit défiler des gens heureux et des gens sombres, des gens qui se quittent et des gens qui se retrouvent, des gens qui partent et des gens qui rêveraient de partir. Et surtout, une gare est truffée de distributeurs en tous genres.
Elle abrite des sans-envie, des sans-loisirs, des sans-joie qui tuent le temps à regarder des magazines dans les Points Relais, à regarder les allées et venues des voyageurs avec valise, sac à dos ou porte-documents, à cuver leur ennui sur un de ces bancs où l'on attend le train ou une vie meilleure.
Une gare est chaude, elle est lumineuse, elle sent bon le pain chaud, l'encre des journaux et le cuir des bagages. Elle vous donne la certitude que l'ailleurs est au bout de chaque billet vendu aux guichets automatiques. La gare est un antre d'automates à sous.
Contre quelques pièces ou contre le code secret de votre carte bancaire, ils vous donnent un aller-retour pour Budapest, un sandwich longue conservation, un capuccino en gobelet de carton, une fleur pour Tante Léonie, un paquet de chewing-gums ou une boisson fraîche. C'est le royaume du « tire mon tiroir et l'objet de ton désir cherra ! »

Hauptbahnhof de Munich. Dix heures du soir. Les lumières se font plus discrètes. Certaines échoppes ont baissé leur rideau: le fameux « Ladenschlussgesetz », loi allemande incontournable régissant la fermeture des surfaces commerciales. C'est l'heure des commerces à fente, ces boutiques compactes en métal qui vous servent sitôt que vos pièces ont frappé le point G de la comptabilité électronique ou que votre code bancaire a actionné soit l'imprimante à ticket soit le bras mécanique qui amène le produit que vous avez sélectionné vers cette sortie où votre main est déjà prête à le saisir.
Les automates allemands offrent plus de choses que les automates français. Des cigarettes par exemple et des boissons alcoolisées. Autres pays, autres lois. Autres pays, autres choix. A Munich, à la gare, on peut voir un distributeur automatique d'un genre rare : un distributeur médical, un Med-O-Mat signalé par une effigie de dame en blouse blanche. On y trouve du matériel de premier secours, pansements, mouchoirs en papier, désinfectant, même des cachets de paracétamol, bref toutes ces choses dont on peut faire aisément usage sans passer par la case docteur.
Mais ce qui est étrange c'est que ce distributeur distribue aussi des tests de dépistage du cancer. Contre quelques espèces sonnantes et trébuchantes vous pouvez faire le test de dépistage du cancer de la prostate ou du cancer colo-rectal. Plus sympathiquement vous y trouverez aussi un test de grossesse.
Pourquoi tout cela, sag warum ? Tout simplement parce qu'il se peut que vous arriviez en gare de Munich prêt à entrer dans un train vers l'ouest ou vers l'est et que vous soyez frappé par cette question lancinante : « Ma flore intestinale serait-elle devenue atypique ? » ou « Où en suis-je avec les cellules de cette prostate que le destin a placé en moi rien que pour me causer des soucis ? »
Grâce au Med-O-Mat, vous n'aurez pas à vous torturer longtemps avec des angoisses, peu après Munich, dans le train, votre résultat s'affichera sur la bandelette adéquate. C'est chouette tout de même tous ces tests en vente libre. Personnellement je me suis payé un test de grossesse. Quelle émotion ! Que de souvenirs ! Comme dirait Confucius : « Il y a un âge où même penser à la chose fait tellement de bien ! »

Gare, gare !
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