Gandhi et organdi !

Publié le par Huguette DREIKAUS

Qui se soucie encore du Prix Eurovision de la chanson ?

C'est comme une baratte aux formes obsolètes reléguée dans les caisses entreposées dans le garage mais qu'on garde parce qu'elle permet toujours de faire... son beurre. Si les chansons proposées vous ennuient, si vous en avez marre d'entendre depuis 60 ans les compositions de l'Allemand Ralph Siegel, coupez le son et regardez le look des chanteurs.

Faites ce voyage entre Game of Thrones, The Crow ou Le Petit Chaperon rouge. Le look est primordial pour les chanteurs. Les sociologues disent « La mode nous permet de montrer à l'extérieur ce que notre âme ressent à l'intérieur ». Vous l'aurez compris, la mode et la philosophie vont de paire (paire de Louboutin bien entendu).

Il y a du Nietzsche dans ces Hommes aux Dés qui veulent sans cesse bouleverser les codes: « Umwertung aller Werte » (renversement des situations existantes). La gent des porteuses d'oestrogènes tressaille devant les podiums ou les magazines pour savoir si les cheveux doivent être portés courts, longs ou rasés, si la distance entre les cuisses est toujours préconisée à 2,5 centimètres ou si une fréquentation abusive des centres de fitness est indispensable pour aller jusqu'aux 3 cm.

Et voilà que les hommes s'y mettent. À défaut de pouvoir varier à l'infini le patron du « pantalon veste » et de la matière des godasses, ils doivent se distinguer par des barbes, des colliers, des rouflaquettes et surtout par des tatouages. C'est le Matt Pokora - look , quasi universalisé, tant on rencontre de ses clones dans les rues et encore plus sur les podiums.

Strasbourg a sa fashion-week. Tout y est ruban-rose, petit verre de crément sous le regard d'une Miss aux jambes si longues que les fabricants de collants ont dû revoir leur production. Tout y est, les VIP customisés par un foulard posé négligemment sur l'épaule, par du gel sculptant leur chevelure jusqu'à les faire ressembler à une oeuvre de France Siptrott. Tout y est. Même ce qu'on n'attendait pas. La leçon New Age. C'est Gandhi dans l'organdi ! « La paix sur cette terre, l'amour entre les hommes, voilà ce que nous cherchons à atteindre. » C'est la Malala Confection. On vise le prix Nobel de la Paix loin pourtant des saris des maîtres à pensée de l'Inde et du Pakistan.

On se demande quels sont les messages de paix subliminaux contenus dans la déambulation de mannequins auxquels on demande d'avoir les mensurations exactes du costume coupé par un couturier philosophe dans ce monde où c'est la personne qui doit être à la taille du costume et non l'inverse.

Dans cette salle gansée de rose, parcourue par un tapis blanc, au milieu de gens surtout vêtus de noir passe-partout sauf si on a fait tomber la mayonnaise de la verrine sur le haut, je me serais donc crue dans un meeting de Moon, de Billy Graham ou de Ségolène Royal tant on y diffusait de messages contenant les mots « amour », « love », « fraternité. »

J'ai appris que le monde doit avancer dans l'amitié, dans la compréhension réciproque mais avec des coiffures collées au gel, des petites robes stylisées pour les filles et des visages aux barbes taillées comme les buis de Le Nôtre pour les hommes.

Bizarrement je ne me suis pas sentie « Soeur » dans cet univers guimauve et amour. Pas la bonne taille. C'est une fraternité ouverte aux tailles 36.

Gandhi et organdi !
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