Descendez du balcon !

Publié le par Huguette DREIKAUS

« Descendez du balcon ! » Cet impératif est devenu une promulgation royale en Grande-Bretagne, un oukase, pour interdire aux sujets indignes de la famille de la Queen de paraître « on the Buckingham Balcony » pour saluer les sujets de Sa Grâcieuse Majesté.

Au pays du five o'clock, pas besoin de guillotine pour éliminer les têtes couronnables ! Leur mise au ban de la cérémonie « uniformes rouges et chapeaux psychédéliques » pour saluer la foule est un signe fort de leur déchéance !

Dé-balconnade accomplie pour Henry, duc de Sussex, dit Harry, et du Prince Andrew, duc d'York, respectivement 6e et 8e dans l'ordre de succession au trône. Tous les deux sont interdits de « winke, winke ». What a pity !

Autres gens, autres moeurs ! Pour nous, les déconfinés du 11 mai, descendre du balcon est plutôt un acte qui nous réjouit. Revenons sur terre. Revenons sur le plancher des vaches ou plutôt sur le plancher des terrasses. Elles sont revenues, elles sont toutes là.

Il y a celles où l'on passe le matin pour prendre son café préféré, noir ou avec crème, et son croissant, et à midi pour sa blanquette.

Il y a celles où on s'installe comme chez soi pour tenir salon et donner son avis sur les sujets brûlants comme la chloroquine, la mort de Christo, les bévues de Sibeth et où retentissent, dans la tonalité soprano, des cris d'orfraie à propos de tout et de rien, mais surtout à cause des kilos pris pendant le confinement.

Il y a celles où les noctambules et les insomniaques comptent les heures à la somme des verres vides et des cacahuètes englouties.

Il y a celles, avec vue, où des contemplateurs radins tapent l'incruste pour se délecter les yeux en sirotant une seule consommation commandée par demi-journée, en exigeant de surcroît la mise à disposition du quotidien régional.

Et, c'est nouveau, il y a, depuis le 2 juin, la terrasse nouvelle, « la terrasse de survie ». Elle est pour les propriétaires de bars, de cafés et de restaurants, la seule garantie de sauver leurs établissements. Le trottoir devient terrasse. Le parking devient terrasse.

Viendra le jour où les clients apporteront leur chaise pliante et leur table pliante pour ne pas s'entendre dire « on est complet ! » et donc pour s'installer non loin des cuisines de leur resto préféré ou de leur bar préféré, et ainsi perpétuer le concept « vente à emporter », tout en se garantissant de pouvoir déguster leur plat encore chaud.

À chacun de créer sa terrasse individuelle avec table et chaise personnelles, désinfectées par ses soins. Il le faut, afin d'avaler un repas non réchauffé car - grands dieux ! - un repas gastro à 39 euros réchauffé à la maison ? Quelle punition pour le palais et la luette ! Affreux ! Affreux !

Les terrasses sont ouvertes depuis le 2 juin. Il pleut depuis le 3 juin. On attend les pergolas.

 

Descendez du balcon !
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